Définition, contenu et portée de la garantie d'actif et de passif

Cession de titres

Qu’est-ce qu’une garantie d’actif et de passif?

Définition : C’est une clause ou un acte par lequel le cédant de titres (et non de fonds de commerce) s’engage à indemniser le cessionnaire de toute diminution d’actif ou augmentation de passif qui pourrait survenir postérieurement à ladite cession et dont la cause serait antérieure.

Introduction

Lors d’une cession de parts sociales ou d’actions, le cessionnaire reprend l’actif de la société (les ressources), mais également le passif (les dettes). En fonction du pourcentage de titres repris, il prend donc un risque plus ou moins élevé. A ce titre, un repreneur qui devient majoritaire a tout intérêt à se protéger en signant une clause de garantie d’actif et de passif, cette dernière lui permettant d’être indemnisé si d’aventure des dettes non déclarées devaient apparaitre ou si finalement des actifs présents au bilan n’existaient plus. Cet acte doit être signé au plus tard le jour de la cession des titres.

Lors d’une reprise d’entreprise par achat des parts ou actions, il ne s’agit d’aller au plus rapide afin d’en prendre le contrôle à tous prix. Une acquisition sereine passe par de nombreuses étapes et la signature d’une garantie d’actif et de passif en fait partie. En s’appuyant sur une rédaction précise et non équivoque, le cessionnaire va pourvoir éviter toute surprise et s’assurer qu’il paie le juste prix des titres qu’il achète. Le cédant démontre son honnêteté et sa transparence en acceptant de signer cette garantie, ce qui donnera confiance au cessionnaire. Je vous présente la garantie d’actif et de passif plus en détails.

Cession de parts et d'actions : à quoi sert la garantie d'actif et de passif?

Une cession de parts ou d’actions est par nature quelque chose de très abstrait : le cessionnaire acquiert tout ou partie d’une entreprise sur la base d’éléments comptables et d’informations communiqués. Mais concrètement, qu’est-ce qui garantit que tous les éléments d’actif indiqués au bilan existent encore? Et si jamais des dettes dont le cessionnaire n’avait pas connaissance venaient à se déclarer dès le lendemain de l’achat? Ce genre d’événements peut être de nature à compromettre la reprise elle-même. Au-delà d’un simple oubli du cédant, qu’en est-il de la volonté délibérée du cédant de dissimuler certains faits qui seraient de nature à diminuer le prix demandé au cessionnaire, voire l’abandon pur et simple du rachat? La garantie d’actif et de passif permet aux parties de défendre leurs intérêts réciproques par un acte écrit clair, qui anticipe et cadre toute contestation possible à venir.

La garantie d’actif protège le cessionnaire contre toute diminution d’actif dont la cause serait antérieure à la cession de titres. Par exemple, si une machine a été vendue 6 mois avant ladite cession et que le cessionnaire n’en a pas été informé (le dernier bilan n’en faisant pas état), le cédant pourrait être amené à indemniser le cessionnaire au titre de cette vente non déclarée lors de la cession. On ne parle pas ici d’outils à faible valeur, mais d’objets dont le coût est élevé et défini par la garantie elle-même.

La garantie de passif quant à elle protégera le cessionnaire d’une augmentation surprise du passif. Ainsi, tout passif non révélé peut potentiellement déclencher l’activation de la garantie de passif et provoquer l’indemnisation du cessionnaire par le cédant. Ce sera le cas par exemple d’un redressement fiscal qui n’apparaîtrait pas au bilan ou encore d’un procès en cours dont l’issue est incertaine. Le passif généré doit avoir son origine dans un événement antérieur à la date de la cession des titres, mais produire ses effets postérieurement à ladite cession.

Quelles sont les clauses facultatives à considérer?

La garantie d’actif et de passif, sujette à négociation entre les parties, peut en outre contenir les mentions suivantes :

– les limitations éventuelles de la garantie (ex : champ d’application excluant un type d’actif ou de passif spécifiques, montant minimum du seuil de déclenchement, plafond maximum de mise en responsabilité, durée d’activation limitée dans le temps, etc.). Plus le cédant annexera de documents détaillant l’actif et le passif, plus il se couvrira en cas de contestation du cessionnaire, ce dernier n’ayant d’autre choix que de reconnaître qu’il avait eu connaissance du problème soulevé dès l’acquisition

– la garantie de chiffre d’affaires ou de rentabilité : le cédant prend le risque de garantir le bon fonctionnement de la société sur une durée déterminée. Il garantit ainsi, malgré le fait qu’il ne soit plus aux commandes, que l’entreprise affichera un certain chiffre d’affaire et maintiendra sa valeur économique. Bien que le cessionnaire soit très intéressé par ce type de clause, le vendeur doit rester prudent dans les concessions opérées pour vendre

– la « garantie de la garantie » : les parties ont dans ce cas prévu le moyen de régler le cessionnaire afin que ce dernier soit garanti d’obtenir un paiement sans difficulté. Lorsque la réclamation du cessionnaire est validée par le cédant, le somme permettant d’indemniser le cessionnaire provient automatiquement d’un montant séquestré à cet effet sur une durée déterminée, d’un contrat d’assurance, d’une garantie à première demande, etc. Ce type de garantie est plébiscité par tout cessionnaire, qui renforce davantage la réalité de sa protection

– la clause compromissoire : par cette clause, les parties décident de soumettre tout litige éventuel naissant de la garantie d’actif et de passif à un tribunal arbitral composé d’arbitres qu’elles auront désignés (ce qui est différent d’une médiation aux termes de laquelle un médiateur aide les parties à trouver une solution à leur différend). Leur décision se substituera à celle d’un tribunal classique (un appel reste possible à moins de le prévoir expressément dans ladite clause). L’avantage de l’arbitrage est de pouvoir obtenir une décision rendue par des professionnels dans des délais relativement courts.

Comment activer et mettre en œuvre une garantie d'actif et de passif?

C’est dans la garantie d’actif et de passif elle-même (si elle est bien rédigée!) que vous trouverez toutes précisions utiles quant aux conditions de son activation. A ce titre, le cessionnaire doit être extrêmement prudent : il doit respecter tant les conditions de fonds que les conditions de forme. Le cédant sera tenté de ne pas payer les sommes demandées et son avocat regardera immédiatement si le cessionnaire n’a pas dépassé le cadre de ce qui est stipulé dans l’acte de garantie

Par exemple, si le passif d’origine fiscal est exclu du champ d’application de la garantie, pas la peine de demander au cédant un remboursement de TVA… Cette dette ne fait en effet pas partie de la convention signée. Autre exemple : si la garantie indique un délai maximum au-delà duquel le cessionnaire ne peut plus activer la responsabilité du cédant, il convient de respecter scrupuleusement cette date limité. Passé ce délai, le cédant peut légitimement refuser de prendre en charge la créance en question.

Dans tous les cas, il est conseillé au cessionnaire de communiquer au cédant tout document attestant de la réalité du passif demandé et dans l’idéal, la preuve que le fait générateur dudit passif se situe bien avant la cession des titres entre les parties. Ce sera un gain de temps et si l’ensemble des pièces communiquées est suffisamment probant, le cédant n’aura vraisemblablement d’autre choix que d’acquiescer et régler les sommes demandées.

Quel contenu doit-on obligatoirement intégrer à une garantie d'actif et de passif?

Qu’elle soit intégrée à l’acte de cession de titres ou formalisée par acte séparé, la garantie d’actif et de passif se doit d’être claire et précise. Le contenu et la rédaction de la garantie seront aussi poussés que possible et prévoiront obligatoirement :

– la désignation des parties, savoir le cédant (le « garant ») et le cessionnaire (le bénéficiaire ») qui sont soit des personnes physiques, soit des personnes morales

– le cadre de l’opération de cession dans lequel la garantie est accordée (ex : les titres concernés, descriptif de la société hébergeant les titres, prix de cession, dernier bilan de référence, etc.)

– l’objet de la garantie, c’est à dire l’apparition postérieure à la cession d’un événement de nature à augmenter le passif de la société ou réduire l’actif, mais qui trouve son fait générateur avant la date de la cession

– la garantie de sincérité du cédant qui va attester qu’il a donné toutes les informations utiles au cessionnaire, n’en a omis aucune (dont engagements hors bilan), que les comptes sociaux sont sincères, que le nombre de salariés est bien celui qui est déclaré, etc.

– les conditions de mise en jeu de la garantie (ex : durée de protection, nature de la créance, réponse du vendeur, modalités d’indemnisation, etc.)

Quelles sont les limites à ne pas dépasser afin de maintenir l'équilibre entre les parties?

On imagine que le cédant voudra limiter la portée de son engagement et donc, limiter les conditions dans lesquelles la garantie d’actif et de passif peut s’appliquer. Le cessionnaire, à l’inverse, voudra se sécuriser au maximum et cherchera à étendre le champ d’application de ladite garantie autant que faire ce peut. Les parties vont alors négocier entre elles le périmètre « acceptable » de cette garantie et notamment :

– la durée de l’engagement : peu de cédants choisiront de s’engager au-delà de 5 ans. Plus les années passent, plus il sera difficile d’appliquer la variation d’actif ou de passif au cédant. En général, la garantie trouvera à s’appliquer dans un délai de 2 à 5 ans à compter de la cession, la portée de l’engagement pouvant être dégressive au fil des ans (ex : plafond de garantie, nature des créances pris en garantie, etc.)

– les conditions d’activation : le cessionnaire n’a pas le loisir de mettre en œuvre la garantie quand bon lui semble! Il a un temps limité défini dans l’acte au-delà duquel il perd sa protection. Ce délai est à définir avec précaution car s’il est trop court, le cédant pourra contester la réalité de sa mise en cause si le cessionnaire a trop attendu lors de la découverte de l’événement préjudiciable. Attention également à la manière dont la garantie doit être activée (ex : courrier LRAR, exploit d’huissier, pièces demandées, etc.) puisque là encore, le cédant pourra contester la validité de la mise en jeu de sa responsabilité par défaut de forme

– les montants concernés : en pratique, les parties prévoient un seuil minimum en deçà duquel le cessionnaire ne peut pas activer la clause de garantie d’actif et de passif. Par exemple, 5 000 €. Chaque créance éligible supérieure à ce montant et qui se révélerait post cession, serait alors prise en charge par le cédant. Un plafond maximum est en outre conseillé (par exemple 50 000 €), au-delà duquel le cédant ne sera pas tenu responsable ; ce montant est très important et ne doit pas être négligé, sous peine d’avoir à compléter de sa poche si les dettes découvertes dépassent ce même plafond…

– une franchise en cas d’activation : le cessionnaire devra s’acquitter du paiement d’une franchise en cas d’activation de la garantie d’actif et de passif (par exemple 2 000 €). Clause surprenante, elle sert à limiter les activations multiples sans cause réelle et sérieuse afin que le cessionnaire puisse rester raisonnable dans ses tentatives d’indemnisation.

Application d'une garantie d'actif et de passif : quels sont les effets?

Le cessionnaire a envoyé au cédant toutes pièces utiles établissant la réalité de la diminution de l’actif ou de l’augmentation du passif. Que se passe-t-il ensuite? Le cédant va examiner la demande et probablement vérifier dans un premier temps que le cessionnaire a bien respecté les conditions de mise en œuvre de ladite garantie (ex : délai d’activation, nature de la créance, seuil des sommes en jeu, etc.).

Ensuite, le cédant va prendre position : soit il admet devoir le montant en question, soit il le conteste. En application de cette première hypothèse optimiste, le cédant va devoir déterminer face à quel type de garantie il se trouve avant de régler le cessionnaire (que le moyen de le faire soit déjà prévu ou non parce que l’on appelle la « garantie de la garantie »). En effet, ladite garantie peut couvrir plusieurs réalités : une garantie de passif pure et simple (prise en charge des dettes dont l’exigibilité intervient post cession mais qui sont nées avant), une garantie d’actif et de passif (le cédant garantit en plus du passif toute diminution d’actif ou défaut d’actif) ou une garantie d’actif net (compensation d’une diminution du passif par une augmentation de l’actif).

Si le cédant conteste la mise en œuvre de la garantie d’actif et de passif, il va répondre au cessionnaire qu’il n’accepte pas sa demande et motiver ce refus (ex : défaut de forme, délai expiré, seuil de passif non atteint, etc.). Le cessionnaire va alors devoir choisir entre l’abandon de sa demande et le fait d’aller plus loin. Selon ce qui est indiqué dans la garantie, il pourra porter sa demande devant un médiateur, un tribunal arbitral ou au tribunal. Une décision sera rendue par l’un de ces organes et les parties devront s’y soumettre (à défaut d’appel).