Intro

Qu’est-ce qu’un pacte d’associés ou d’actionnaires ?

Définition : Le pacte d’associés (les associés sont titulaires de parts sociales de SARL par exemple) ou le pacte d’actionnaires (les actionnaires sont détenteurs d’actions, comme dans une SAS) est un contrat par lequel tout ou partie des associés/actionnaires entendent fixer certaines règles complémentaires à celles présentes dans les statuts de la société.

Les clauses abordées dans un pacte d’associés ou d’actionnaires traitent en priorité des conditions d’entrée et de sortie des associés, des droits à dividendes de chacun et du fonctionnement général de la société. Mais elles peuvent également décider plus spécifiquement du droit à l’information de tel ou tel associé, de limites liées à la confidentialité ou d’interdiction de concurrence. Au bon vouloir des signataires.

Les avantages liés au pacte d’associés ne sont plus à démontrer (j’utiliserai les termes « pacte d’associés » et « associés » puisque ce qui est dit est aussi valable pour le « pacte d’actionnaires » et les « actionnaires ») : confidentialité (seuls les signataires connaissent son existence, cette convention n’étant publiée nulle part), aménageable facilement (pas de formalité si ce n’est un avenant audit contrat signé par les parties au pacte), sécurisant (quasiment toutes les situations sont prévues, ce qui anticipe les conflits éventuels entre associés pouvant parfois paralyser le fonctionnement de la société) et stratégique (dans certains cas, les alliances entre associés peuvent donner aux minoritaires des pouvoirs importants, tels qu’une majorité de blocage automatique…).

Vous l’aurez compris : rédiger un pacte d’associés demande de la créativité, de la technique et de l’expérience. C’est un document essentiel qu’il ne faut surtout pas négliger. Lors de la création d’une entreprise, les relations entre associés sont toujours bonnes. Au bout d’un an ou deux, j’ai pu voir de nombreux cas de ruptures tragiques entrainant jusqu’à la disparition de beaux projets. Je ne peux que vous inviter à considérer la rédaction d’un pacte d’associés si vous êtes plusieurs et qu’au fond de vous, vous ne pouvez exclure la possibilité d’un conflit entre associés ou la nécessité de préciser des points pas ou peu abordés dans les statuts. Appuyez vous sur un avocat qui saura vous conseiller : ce qui est écrit est bien plus clair pour tout le monde et évite les non dits lourds de sens.

Pourquoi conclure un pacte d’associés ?

Bien que la rédaction d’un pacte d’associés soit facultative, il est parfois plus qu’utile d’y avoir recours. Voici plusieurs raisons pouvant vous y inviter :

Pour aller plus loin dans l'organisation de la société

Les statuts couvrent un ensemble de points jugés suffisants concernant le fonctionnement général de la société. Mais on ne peut pas dire qu’ils prévoient toutes les situations possibles et notamment celles qui peuvent être conflictuelles (ex : une sortie forcée d’associé, un dividende prioritaire, etc.). La pacte d’associés est là pour régler ce type de problème : grâce à lui, un maximum de cas seront déjà prévus d’avance et si l’un d’entre eux devait survenir, il suffirait d’appliquer ce qui est écrit et d’ores et déjà accepté par les signataires.

Pour assurer une unité entre plusieurs associés

Le pacte d’associés ne peut concerner que quelques associés, les autres n’étant informés dudit pacte qu’au bon vouloir des signataires. Ce procédé permet en outre de s’assurer par anticipation de la ligne de conduite de certains associés afin d’éviter les surprises et donc, la mise en difficulté de la société. Des stratégies de vote sont alors envisageables, de même qu’un mode de gestion plus personnalisé, afin de montrer aux associés (et surtout aux investisseurs) le chemin à suivre sur une durée fixe, tout en les rassurant.

Pour définir les conditions d'entrée et de sortie des associés

Inutile de vous dire que la répartition du capital est un élément clé du contrat de société. Vous ne voulez pas vous retrouver du jour au lendemain avec de nouveaux associés inconnus jusqu’alors, ou pire encore vous rendre compte que vos droits de vote sont moindres du fait de l’entrée de nouveaux associés (on dit alors que l’associé a été « dilué »). Le pacte va réduire l’aléa en déterminant qui peut rentrer, comment et selon quelles conditions. Il fera de même pour les sorties d’associés volontaires ou forcées. Un arsenal de clauses encadre les mouvements de titres afin de maintenir cet équilibre fragile existant entre associés.

Pour aborder des thèmes délicats en toute confidentialité

Le pacte d’associés est secret et n’est pas communiqué aux tiers ou déposé au centre de formalités, que ce soit au moment de sa rédaction initiale ou en cas d’avenant ultérieur modificatif (contrairement aux statuts de la société). Personne ne saura quel dividende untel touchera en priorité ou quel actionnaire souhaitant rester discret a pu intégrer le capital, ou encore les différences de traitement entre chaque compte courant d’associé… Ce genre d’informations demeure idéalement confidentiel dans la mesure où il touche l’associé au plus près de son « intimité ».

Pour sécuriser un investisseur

Lors de la création, en phase de croissance, voire en cas de difficultés passagères, les start-up ont besoin de capitaux si elles entendent poursuivre leur développement. Le pacte d’associés permet de rassurer un investisseur potentiel en lui accordant un traitement de faveur qui l’encourage à mettre des fonds dans votre entreprise et pas dans une autre. Bien sur, le pacte à lui seul ne suffira pas à décider un investisseur, puisqu’il analysera la structure dans son ensemble, mais il donnera un signal positif et professionnel pouvant faire pencher la balance.

Quelles différences entre un pacte d’associés et les statuts de la société ?

Si les statuts peuvent exister sans pacte d’associé, l’inverse n’est pas vrai. Parmi les différences notables, on peut citer :

La philosophie globale

Alors que les statuts sont un contrat obligatoire entre tous les associés qui définissent le fonctionnement général de la société, le pacte d’associé est une convention facultative entre plusieurs associés (ou la totalité) qui établit des règles particulières impactant les associés ou la société. Par conséquent, les statuts demeurent le document de référence. En effet, une clause insérée dans un pacte d’associés qui serait contraire aux statuts ne produit aucun effet.

La portée de l'engagement

Ne pas respecter une clause statutaire peut être synonyme de nullité de l’acte puisque les statuts engagent l’intégralité des associés qui en ont accepté chaque disposition. Le non respect d’une ou plusieurs clauses d’un pacte d’associés n’entrainera pas la nullité de l’acte, mais permettra aux autres signataires de demander des dommages et intérêts.

Les formalités de modification

Si vous modifiez les statuts, une assemblée générale soumise au vote des associés doit être tenue, puis déposée au Greffe du Tribunal de commerce, accompagnée d’autres documents (de type M2, annonce légale, justificatif, etc.). Apporter des modifications à un pacte d’associé ne requiert qu’un simple avenant signé par les parties, sans autre dépôt ou formalité.

L'information des tiers

Les statuts sont déposés au Greffe du Tribunal de commerce compétent (création et modification) et peuvent être consultés par toute personne. Le pacte d’associé est un document occulte qui n’est publié nulle part est qui reste parfois même secret pour les associés non signataires (d’où l’intérêt de mettre dans le pacte les clauses que l’on ne souhaite pas porter à la connaissance des tiers).

La durée

La durée de vie d’une société est indiquée dans les statuts (le plus souvent, 99 ans, renouvelables). Le pacte d’associé quant à lui a le plus souvent une durée plus limitée (quelques années). Un ensemble d’obligations peut ainsi s’éteindre au terme d’un pacte lors de la survenance d’un événement majeur, tel que la sortie d’un associé, sans avoir à toucher les statuts (notamment en SAS où l’article relatif à la répartition du capital n’est pas mis à jour en cas de mouvement de l’actionnariat).

Quelles clauses importantes trouve-t-on dans un pacte d’associés ?

De quelques pages à plusieurs dizaines, le contenu du pacte d’associés dépend des points que vous entendez régler. Chacune des clauses suivantes (basiques, spécifiques ou élaborées), si elles ne sont pas déjà dans les statuts, peuvent avoir leur place au sein de cette convention.

Clauses basiques constituant le socle du pacte d'associés
  • l’objet : souvent négligée, la rédaction de l’objet reflète pourtant « l’esprit de la convention ». A ce titre, plus elle est précise, plus elle permet de s’y référer en cas de difficulté d’interprétation du pacte. Si l’objet est d’aménager le statut d’un nouvel associé, la sortie de ce dernier mettra naturellement un terme au pacte
  • la durée : un pacte d’associés est à durée indéterminée (risqué puisque tout signataire est en mesure de rompre le pacte quand bon lui semble et sans avoir à s’en expliquer) ou déterminée (plusieurs années ou en fonction d’un événement particulier, sachant que chaque disposition du pacte peut avoir une durée différente et bénéficier ou non d’une tacite reconduction!)
  • la non concurrence : efficace, cette clause empêche un associé de développer en parallèle une activité concurrente (ou d’y participer) de manière directe ou indirecte. Afin de produire ses effets, elle doit notamment avoir une durée raisonnable, être limitée géographiquement et être rémunérée. Coupler cette clause avec une obligation générale de loyauté et/ou une clause d’exclusivité est une bonne idée
  • l’indivisibilité : en cas de nullité de clauses essentielles à la conclusion du pacte, l’intégralité de ce dernier tombe à l’eau. On évite ainsi qu’une clause devenue sans effet (par exemple, une clause en contradiction avec les statuts) puisse déséquilibrer l’ensemble de la convention dans la mesure où son existence était primordiale
  • la confidentialité : un des atouts du pacte d’associés étant justement de ne pas être divulgué aux tiers, pourquoi ne pas interdire purement et simplement aux signataires d’en communiquer le contenu à qui que ce soit? Cette obligation permet de s’assurer que rien ne filtrera, sous peine de dommages et intérêts (pratique, lorsque d’autres associés doivent nécessairement être tenus à l’écart de certaines informations…)
  • le règlement des litiges : ne pas passer par le circuit traditionnel de la justice mais par une procédure d’arbitrage permet de maintenir la confidentialité, de gagner du temps et d’éliminer la possibilité d’un appel de la décision. Un arbitrage bien orchestré s’avère très efficace, même s’il demeure coûteux
Clauses relatives aux mouvements de titres
  • l’inaliénabilité : afin de s’assurer qu’aucun associé ne se retire de la société avant un délai minimum, il est possible de bloquer tout mouvement dans l’actionnariat pendant plusieurs années. Il faut donc bien connaître ses associés pour ne pas être coincé avec eux par le biais de cette clause…
  • la limitation de participation : un ou plusieurs associés s’interdisent de détenir une participation dans la société au-delà d’un seuil prévu. A l’inverse, il se peut que ces mêmes associés demandent en contrepartie la garantie qu’ils ne tomberont jamais en dessous d’un certain seuil de participation, par crainte d’être dilués
  • la préemption : en cas de cession de titres, les associés (ou certains en particulier) ont la possibilité d’acquérir tout ou partie desdits titres avant un tiers ou d’autres associés (ce qui facilite les alliances, évite qu’un actionnaire puisse diluer les autres et limite les entrées de nouveaux associés peu souhaitables). S’ils ne préemptent pas, la cession projetée à un tiers peut intervenir, sous réserve d’être à son tour agréée par les associés
  • l’agrément : si les statuts ne prévoient pas cette clause (ce qui est plutôt mauvais signe), il est primordial de l’insérer dans le pacte. En effet, en cas de cession à un tiers (ou même à un autre associé, conjoint, descendant, etc.), si l’objectif est de verrouiller la société au maximum), les associés ont un droit de regard concernant ladite cession et peuvent s’y opposer, au terme d’une procédure précise
  • la sortie conjointe : cette clause souvent pertinente donne le droit aux associés concernés de sortir de la société au même moment qu’un autre. En pratique, si une personne rachète vos titres, les autres associés peuvent exiger que les leurs soient également rachetés, aux mêmes conditions. C’est une option intéressante pour des minoritaires qui verraient l’associé principal partir et ne voudraient pas du repreneur
  • le retrait volontaire : un associé demande à quitter l’aventure! un tiers, un autre associé, la société même (par le biais d’une réduction de capital par annulation de titres) rachète alors la participation de l’associé sortant. Une grande prudence s’impose sur cette clause : imaginez que 3 ou 4 associés l’actionnent en même temps… Ca peut faire très mal à la trésorerie de la société ou à l’associé qui fait l’effort de mettre la main à la poche
  • le retrait forcé (l’exclusion) : plusieurs cas prévus par cette clause entraineront automatiquement la cession forcée des titres d’un associé. Ex : en cas de concurrence déloyale avérée, d’abus de biens sociaux, de dépassement d’un certain âge parfois, etc. Pensez qu’un associé voulant causer du tort n’a quasiment jamais l’intention de partir. Cette clause limite le risque de paralysie et a le mérite de dégager une solution
  • le buy or sell : ce mécanisme redoutable exige d’un associé qu’il vous cède ses titres à un prix que vous lui proposez ou qu’à défaut, il soit contraint de vous acheter les vôtres au même prix! Cette clause prend tout son sens lorsque 2 associés égalitaires détiennent 100% du capital d’une société et qu’ils s’enlisent dans des conflits nuisibles à la structure
Clauses concernant la gestion de la société
  • le Droit Préférentiel de Souscription : le « DPS » donne le droit aux associés de pouvoir, en cas d’augmentation de capital et proportionnellement au nombre de titres qu’ils détiennent, souscrire de manière prioritaire aux nouvelles actions. Les associés ont alors la certitude, s’ils en ont les moyens, de conserver le même pourcentage au capital. S’ils renoncent à l’exercice du DPS, d’autres associés pourront accroître leur participation et éventuellement diluer les minoritaires
  • les droits de vote : différentes majorités (renforcées ou non par le pacte) sont nécessaires pour prendre les décisions plus ou moins importantes affectant la société. En vous assurant du soutien de certains associés, vous pouvez avoir la certitude de faire passer la décision souhaitée, puisqu’il voteront favorablement pour votre projet. Mais cela va bien plus loin : il est possible de faire renoncer un associé temporairement à son droit de vote, d’instaurer un droit de véto pour les décisions importantes, d’imposer une concertation préalable confidentielle avant une assemblée, etc.
  • le droit d’information : un simple associé dispose finalement de peu d’informations de gestion courante. Au-delà de ce qui lui est succinctement fourni lors de l’assemblée générale annuelle, il doit adresser au dirigeant ses questions/requêtes, ce dernier répondant… ou pas. En prévoyant un droit d’information plus détaillé (ex : suivi de trésorerie, communication du CA mensuel, les investissements à venir, etc.), les associés (et surtout les investisseurs) ont un sentiment rassurant de transparence
  • les pouvoirs des dirigeants : les dirigeants (Président de SAS comme Directeur général par exemple) disposent des pouvoirs les plus étendus par nature. Et c’est parfois un problème… Conditionner tout investissement conséquent à l’autorisation de la majorité des associés est un bon moyen de limiter les risques d’une gestion contestable (quoi, votre Président roule en Ferrari et il n’y a plus de dividendes pour les actionnaires?!) On peut aussi limiter la capacité à contracter un emprunt seul, à signer un bail pour le compte de la société, à céder des actifs clés, etc.
  • les rémunérations des dirigeants : si elles sont prévues d’avance et acceptées de tous (fixes et/ou variables), aucune contestation ultérieure ne sera possible, contrairement à la ratification traditionnelle des rémunérations lors d’une assemblée à venir. Attention à mettre ce genre de clause dans un pacte regroupant au moins la majorité des associés afin de ne pas avoir de blocage lors de l’assemblée la validant par les non signataires dudit pacte
  • le sort des comptes courants d’associés : on appelle compte « courant d’associé » l’inscription comptable qu’un associé reçoit en échange d’une somme qu’il a prêté à la société (ou en contrepartie de plusieurs types de ventes…). Puisque la société lui doit de l’argent et que le compte courant est par principe exigible à tout moment, les bloquer sur une période ou prévoir des modalités de remboursement aménagées améliore la gestion de la trésorerie. Les banques aiment cette clause car elle favorise le remboursement de leur emprunt par le biais d’une trésorerie a priori suffisante
  • la répartition des dividendes : tout en étant rappelé qu’on ne peut pas priver un associé de dividendes, on peut néanmoins lui accorder une part plus importante que sa participation au capital ou à l’inverse, la réduire. Par exemple, un investisseur étant naturellement motivé par le retour sur investissement, celui-ci sera heureux de bénéficier d’un « dividende prioritaire » lui assurant avant les autres associés, la somme qu’il considère comme due (notamment s’il est minoritaire)

Comment mettre en place un pacte d’associés efficace ?

Ne pas faire de pacte d’associés sous prétexte que tout peut être intégré dans les statuts est peut-être vrai si on n’aborde qu’un point précis ou deux en sus des articles classiques présents dans les statuts… Mais si le pacte est plus conséquent (ou ne vise que certains associés), autant faire un document séparé qui sera plus lisible et cohérent. De plus, son contenu restera confidentiel et facilement modifiable, contrairement aux statuts.

La rédaction d’un pacte d’associés suppose une réflexion aboutie en amont. De nombreuses erreurs ou oublis peuvent être commis par un rédacteur non averti ou pire encore sur la base d’un modèle internet. Assurer l’équilibre du pacte d’associés demande de l’expérience et du savoir-faire. Il doit en effet être complet (sans pour autant être trop contraignant), détaillé (et néanmoins sans incohérences) et complémentaire aux statuts (sans jamais les contredire!).

Un avocat n’est clairement pas de trop pour cette tâche! Je suis à votre disposition pour échanger sur le sujet, vous donner tous conseils utiles en la matière, rédiger intégralement votre pacte d’associés (ou d’actionnaires) sur-mesure et vous accompagner plus largement si nécessaire.

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